Revue syndicale à caractère scientifique et culturel de la CGT FERC Sup

Nuage de mots


Dernière publication



La Résistance s’organise


Accueil > Tous les cahiers thématiques > Document d’orientation de la CGT FERC Sup • 3e congrès (Blainville-sur-Mer (...) > 1. La situation dans l’ESR > 1.2 ComUE, fusions et régionalisation

juillet 2017

1.2 ComUE, fusions et régionalisation

En 1998, le processus de Bologne qui visait à créer un « Espace européen de l’enseignement supérieur » a instauré le modèle LMD (trois cycles Licence/3 ans – Master/5 ans – Doctorat/8 ans) qui normait et déstructurait les diplômes nationaux français. En 2006, le Pacte pour la recherche a créé les Pôles de Recherche et d’Enseignement supérieurs (PRES). En 2007, la loi LRU-Pécresse a rendu les établissements « autonomes » en matière de gestion avec l’accession aux Responsabilités et Compétences Élargies (RCE). En 2013, pour parachever le mouvement engagé par ses prédécesseurs, la loi LRU-Fioraso provoquait la restructuration générale de l’ESR autour des Communautés d’universités et d’établissements (ComUE) et des fusions d’établissements d’enseignement supérieur et de recherche. Dans le même temps, l’austérité budgétaire, le financement de la recherche par projets (ANR, contrats européens, régionaux) et le financement de l’« excellence » (Idex, Labex, Equipex…) ont resserré les moyens sur quelques établissements ou équipes, au détriment de l’immense majorité des établissements, des personnels et des étudiants.

Poursuivant la politique précédente, les gouvernements Hollande ont mis en œuvre, à marche forcée, une régionalisation et une territorialisation (métropolisation notamment) de l’ESR national imposant partout fusions d’établissements au sein des ComUE, en s’affranchissant quasiment toujours de l’avis des personnels et des usagers qui s’y opposent.

Sans reprendre toute l’analyse développée dans le document du Congrès FERC Sup CGT de 2014, il n’est pas inutile aujourd’hui de dresser un état des lieux après 3 ans de LRU-Fioraso et de faire le constat que notre pronostic s’est malheureusement vérifié : l’aggravation des conditions de travail des personnels et d’étude des étudiants est avérée alors que la dislocation de l’ESR préparant sa marchandisation partielle est largement entamée.

1.2.1 Le processus de régionalisation

La restructuration de l’ESR a servi de laboratoire anticipé au redécoupage des régions. Ceci n’est pas une illusion d’optique : dans les réunions de suivi organisées par les préfets préfigurateurs des nouvelles régions, tous les directeurs régionaux sont présents, sauf un : celui du MENESR.

Si on regarde la carte des regroupements régionaux (qui ne cesse de changer, la carte est déjà obsolète), on voit bien le recadrage à marche forcée de l’ESR effectué en fonction du redécoupage territorial. Ce qui ressort tout aussi clairement, est la correspondance très forte entre les regroupements universitaires et la carte des 14 métropoles créées dans le cadre de la réforme territoriale. Ces grandes agglomérations ont vu leurs prérogatives considérablement renforcées, notamment dans le domaine de l’action économique, de l’aménagement du territoire, mais aussi de l’enseignement supérieur et de la recherche. La notion d’égalité d’accès aux services publics sur tout le territoire n’existe plus, puisque les moyens publics sont largement concentrés désormais dans les métropoles, au service des grands groupes qui s’y trouvent, et au détriment des autres territoires. Dans notre secteur, les fusions d’établissements, les plans campus, les IDEX... sont tous concentrés dans les métropoles, avec le soutien inconditionnel des notables locaux. Il est saisissant de constater que la santé vit exactement les mêmes réformes, avec des regroupements d’hôpitaux, des établissements d’excellence (IHU), et des GHT (Groupements Hospitaliers de Territoire) qui sont l’équivalent de nos ComUE. Et tout cela s’inscrit dans un contexte de concurrence exacerbée entre les métropoles, cherchant toutes à être plus attractives les unes que les autres pour les grandes entreprises. L’obligation de création des ComUE regroupant plusieurs dizaines de milliers d’étudiantes et d’étudiants et plusieurs milliers de personnels répartis sur d’énormes territoires, réduit les étudiants à une simple matière première nécessaire à leur fonctionnement. Le périmètre d’action de leurs comités techniques (CT) et comités hygiène santé et conditions de Travail (CHSCT) est réduit à leurs personnels propres, et ne correspond pas à celui de leurs CA, qui prennent des décisions concernant l’ensemble des agents des établissements constituant la COMUE.

Cela complexifie d’autant le fonctionnement quotidien des instances des établissements regroupés dans les ComUE. En effet, chaque établissement trace sa route, indépendante en apparence mais contrainte par les décisions des directions opaques de ComUE et ficelée par les différentes associations de DGS et DRH qui, avec la Conférence des présidents d’université (CPU), se sont organisées pour expérimenter et généraliser leurs méthodes de management libérales. Les personnels ne constituent donc plus qu’un équipage de galériens, dont la cadence de travail est rythmée par des DGS et des DRH interchangeables qui ne savent qu’imposer l’austérité ou chercher à assurer la rentabilité libérale de nos établissements.

Nous subissons un plan de restructuration d’ampleur qui disloque le service public d’enseignement supérieur et de recherche. La valse des établissements au sein des ComUE qui se joue actuellement (voir les établissements parisiens ou la ComUE Université Léonard de Vinci par exemple) devrait continuer. En effet, si personne n’y met un terme, cette restructuration va perdurer : il ne faut pas s’attendre à un « point d’équilibre ». Au contraire c’est une reconfiguration permanente qui se met en place, épuisante et déstabilisatrice pour les personnels, fatigués de devoir s’adapter aux réorganisations incessantes, sources de démotivation et d’un profond sentiment d’impuissance. C’est l’ère de l’insécurité pour toutes et tous qui s’impose progressivement.

La politique des regroupements régionaux (ComUE, fusions, intégrations et associations) a plusieurs objectifs à court terme :

  1. Opérer des économies d’échelles en mutualisant des services (informatique, bibliothèques), en fusionnant des services transversaux (langues), en supprimant des formations considérées comme similaires (les fameux « doublons » chassés via l’accréditation de « l’offre de formation » dans le périmètre des ComUE)...
  2. Détruire le peu qu’il reste de démocratie universitaire. La « bonne gouvernance » selon Sarkozy-Pécresse et Hollande-Fioraso consiste à ce que toutes les décisions soient prises avec le minimum de membres élus. Non seulement les conseils sont « enrichis » d’extérieurs (majoritaires dans certains établissements) permettant de minorer les élus, mais il faut aussi contourner les conseils élus (Conseils académiques) et les instances où siègent les personnels (CT et CHSCT). Le pouvoir réel est mis à distance des personnels : selon les cas, aux mains du CA des ComUE, dans les fondations ou les instances chargées de gérer les IdEx.
  3. La précarisation des personnels est à la fois une conséquence et un objectif : les ComUE emploient la plupart du temps des personnels contractuels, parfois détachés des universités. L’augmentation du nombre d’ANT (près de 40%) devient un argument pour sortir les personnels de la Fonction publique d’État.
  4. La régionalisation de l’enseignement supérieur et de la recherche, afin de l’orienter en fonction des besoins locaux qui sont très souvent ceux du patronat. Ce qui remet en cause les diplômes nationaux et les filières jugées « non rentables ».
  5. Mélanger l’enseignement supérieur public et le privé, pour préparer la marchandisation de tout ou partie du supérieur et la remise en cause des missions de service public assurées par des fonctionnaires d’État.

À terme, l’intention des gouvernements, est de créer :

  • une quinzaine au plus d’établissements supposés être compétitifs sur le plan mondial, centrés sur la recherche, sélectifs avec un accès coûteux et dont certaines composantes pourront être privatisées,
  • un maillage territorial plus ou moins dense d’établissements de seconde zone, déconnectés de la recherche ou mal équipés, dépendant du patronat local et du conseil régional, fournissant des enseignements de moindre qualité à « employabilité » immédiate pour la population étudiante la plus importante.

Dans ces conditions :

  • Quel avenir pour les personnels titulaires de la Fonction publique d’État ?
  • Quel service public d’enseignement supérieur ?
  • Qui aura accès à l’enseignement supérieur de son choix ? C’est-à-dire, qui pourra accéder à une formation et une recherche de qualité, sans mobilité forcée du fait de la concurrence entre établissements, des inégalités régionales et de la sélection qui confine déjà à une sévère ségrégation sociale ?

1.2.2 L’An 3 des ComUE : paysage actuel et perspectives

Les craintes exprimées par la CGT FERC Sup dès 2013 étaient justifiées : la divergence des chemins suivis par ces nouveaux établissements est aussi variée dans leur processus de construction que dans leur aptitude à broyer les personnels.

Durant la dernière période, l’ensemble des collègues intervenant sur la scolarité (enseignantes et enseignants, enseignantes-chercheuses et enseignants-chercheurs, personnels de scolarité dans les UFR, personnels dans les services centraux de scolarité) a dû redéfinir à marche forcée l’ensemble des maquettes pour en réduire drastiquement le nombre désormais sous le contrôle des ComUE.

En 2017, les Masters devront aussi tenir compte de la mise en place de la sélection à l’entrée en Master qui va rendre toujours un peu plus élitiste l’accès à un diplôme supérieur en fin de Licence. Ce sera un élément supplémentaire de concurrence entre les établissements et les formations.

Ce sont désormais les ComUE qui sont accréditées pour l’offre de formation, et non plus les établissements de leur ressort, qui continuent d’assurer néanmoins, pour l’instant, l’essentiel du travail de soutier sur le terrain ! Parallèlement, des Fondations de droit privé se créent dans les ComUE pour prendre en charge des aspects particuliers qui transforment pas à pas l’ESR. Par exemple, pour l’IdEx de Lyon, la Fondation pour l’Université́ de Lyon est chargée du volet partenariats socio-économiques. Dans ces fondations, on retrouve souvent le MEDEF, la CGPME, les CCI... Forts de leurs pouvoirs financiers, ils font pression sur les ComUE pour imposer les formations et les contenus qui répondent aux besoins des industries des bassins industriels locaux. C’est un coin supplémentaire enfoncé dans le statut national des diplômes.

Les ComUE favorisent l’entrée d’établissements du supérieur privés dans leur cercle. Des établissements privés confessionnels (catholiques dans leur grande majorité) peuvent désormais se mélanger allègrement avec les établissements publics (cf. la ComUE Lille Nord de France comprenant « l’université » (sic) catholique de Lille.) : dans ces conditions, comment assurer que les financements publics ne soient pas détournés ? Comment garantir la laïcité ? Par ailleurs, les établissements privés qui vont pouvoir bénéficier de leur rattachement à une université, pourront ainsi recruter de plus en plus d’étudiants dans les filières doctorales et détourner certains doctorats à leur effigie. Les écoles d’ingénieurs privées s’ajouteront aux écoles d’ingénieurs publiques et viendront renforcer la mise en place d’une sélection élitiste à la fois sur les résultats scolaires et sur l’origine sociale des étudiants. L’enseignement supérieur à deux vitesses sera un système ségrégationniste qui favorisera la privatisation rampante de l’ESR.

C’est ainsi qu’au sein des ComUE, on assiste à des fusions d’établissements « public-public » (École Centrale Lyon et ENISE), mais aussi à des fusions d’établissements « public-privé » (École Centrale Paris et Supelec). La création de ces nouvelles entités servant le plus souvent de prétexte à une augmentation drastique des frais de scolarité !

La fusion d’établissements issus du public et du privé, crée des conditions de concurrence entre les personnels de statuts différents et divergents : titulaires pour le public et contractuels pour le privé, salaires parfois inférieurs pour le public, grilles indiciaires et avancement pour le public, salaire négocié de gré à gré pour le privé à un niveau parfois plus élevé qu’il ne l’est dans le public. Dans ce cas les nouvelles directions en profitent généralement pour satisfaire les revendications d’augmentation de salaire en proposant aux personnels de statut public de démissionner, pour être réembauchés sous statut privé contre une augmentation de salaire qui sera réexaminée chaque année au cours de l’entretien professionnel annuel... Et, cerise sur le gâteau, une division par deux du nombre de jours de congés ! Dans le cas de basculement du privé vers le public, les mêmes ressorts sont mis en œuvre : l’alignement des primes et indemnités ne se fait pas forcément vers le haut et le RIFSEEP permettra de moduler les rémunérations à la baisse pour la plupart des personnels.

La recherche de rentabilité, souvent justifiée par la fragilité financière, feinte ou réelle, des établissements et par la nécessité de hisser l’établissement au niveau de la concurrence locale ou internationale, est devenue la principale préoccupation des directions d’établissements. Arguant du manque de postes et de moyens, les directions demandent toujours plus d’efforts aux personnels.

Dans ce contexte, il n’y a plus d’intérêt au travail ni pour les personnels ni pour les étudiants. Les personnels se voient dépouillés du sens de leur travail, dans des établissements hors d’échelle, qui deviennent des halls de gare sans âme. Par exemple, des personnels sont isolés du reste de l’établissement (les services centraux d’Aix-Marseille au Pharo), alors que d’autres, laissés pour compte, sont relégués sur des postes sans saveur, aux marches des territoires de ces établissements (Nancy – Metz). Autre exemple : dans les établissements fusionnés, les agents ont dû candidater sur leurs propres postes, pour des missions élargies.

On assiste à une explosion des arrêts maladie, pour raison de surmenage et de mal-être au travail. Toutes ces souffrances au travail sont intrinsèquement liées aux risques sociaux organisationnels. Les directions ne nient pas ces difficultés puisqu’elles créent quasiment toutes des plans de sensibilisation aux risques psycho-sociaux (RPS) et des programmes de gestion de ces risques, mais elles n’en poursuivent pas moins leurs réorganisations/restructurations internes conformément aux constantes recommandations de l’IGAENR et autres inspections.

Coupés d’une appartenance à une communauté universitaire, les personnels finissent parfois par perdre de vue les missions fondamentales de l’ESR : contribuer à forger et transmettre des savoirs. Le sentiment de travailler au sein d’une machinerie dont plus personne ne perçoit ni les dimensions ni les finalités grandit. La machine à broyer tourne à plein régime.

Malgré cela, de nombreuses luttes des personnels avec leurs organisations ont lieu dans les établissements : face à l’éclatement imposé, elles prennent des formes variées et parviennent parfois à s’unifier au sein de nos organisations syndicales. Elles démontrent toutefois que la volonté de résister, de préserver les statuts, les missions, les établissements, les emplois, d’améliorer les conditions de travail… est encore forte.

1.2.3 Les ComUE : opacité à tous les étages

1.2.3.1 Opacité sur la gouvernance

Avec la loi LRU-Fioraso publiée en 2013, les regroupements sous forme de ComUE ont été mis en œuvre sans schéma de principe. Les PRES se transformant automatiquement en ComUE, tout était possible. Seul importait que l’agglomérat se fasse !

Ce sont aujourd’hui autant de statuts, autant de façons différentes de composer et de gérer les ComUE. La composition de leurs CA est diverse et variée. Les modalités de représentation en CA sont très variables : élections directes, élections indirectes ; obligation de listes mixtes avec obligation de représenter tous les secteurs présents dans la ComUE qui forcent aux alliances de listes (syndicales ou non). Ce qui rend très difficile la maîtrise et le contrôle des mandats et la stabilité des alliances.

Si des irrégularités sont constatées et condamnées au tribunal administratif (TA), elles ne perturbent cependant pas réellement le travail des assemblées : ainsi à Lyon, le TA n’a pas souhaité casser le CA constitué de façon non conforme, ni invalider les décisions prises (cf. Université de Lyon, Conseil d’État 15/04/2016). La démocratie universitaire est bafouée sans vergogne !

Le plus souvent, les CA sont devenus des chambres d’enregistrement où les « gouvernances » font entériner des décisions prises en d’autres lieux en utilisant par exemple des votes bloqués : ainsi, à l’université de Lyon, où est proposée dans le même vote, l’adhésion d’organismes publics et privés (ENSIB et école d’architecture publiques, institut catholique privé) en qualité de membres associés.

Le fonctionnement des comités technique d’établissements et des CHSCT est considérablement alourdi en raison de la taille des établissements. Par exemple, les territoires à couvrir sont si grands que les temps de déplacement deviennent supérieurs aux temps de décharges.

À partir de 2017, les ComUE devraient passer aux RCE. Quels seront les flux financiers gérés, générés par ces ComUE, dans quelles conditions et sous quel contrôle ? Comment seront gérés les personnels ? Quelles seront les infrastructures concoctées pour gérer les IdEx ? Quelles autres formes de gestion des flux financiers (fondations, etc.) ?

Les ComUE sont des établissements publics scientifiques, culturels et professionnels (EPSCP) comme le sont les universités. Or, ce cadre est encore trop contraignant pour que s’installe partout la restructuration voulue par le gouvernement. Les résistances des personnels et de leurs organisations syndicales qui refusent de voir disparaître leurs établissements dans les ComUE sont encore trop fortes malgré toutes les tentatives des directions de ComUE et d’établissements. Si le gouvernement a caressé pendant un moment la possibilité de créer un cadre plus souple en créant un nouveau type de ComUE pouvant déroger à l’essentiel des contraintes auxquelles sont encore tenus les EPSCP, il a reculé et s’est contenté de doubler la période d’expérimentation des nouvelles « gouvernances » des ComUE (10 ans au lieu de 5 ans).

Néanmoins, le projet d’assouplir les statuts des ComUE pour casser les résistances, imposer les fusions et resserrer encore la « gouvernance », demeure et devrait réapparaître sous une forme ou une autre.

1.2.3.2 Opacité sur la gestion des personnels

Les ComUE font table rase du passé, notamment pour la gestion des personnels. Encore une fois, il n’y a pas de règle générale applicable partout, même si la tendance est la même.

La loi LRU-Fioraso a transformé tous les PRES existants qui sont devenus des ComUE avec les personnels qui y étaient associés. Nombre de postes sont intitulés « chargé de mission », dévolus à des agents non titulaires, souvent sur des postes en CDD. Ce déni de reconnaissance de leurs droits s’est souvent doublé d’un dégraissage préventif de ces agents non titulaires.

Il arrive que ce soit des titulaires d’un doctorat qui sont recrutés sur ces postes avec des salaires d’ingénieur d’études pour des CDD de 3 ans. On assiste également à des affectations de personnels, soit par mise à disposition illégale et/ou sans convention, soit par détachement de personnels.

Afin de réduire les coûts, les directions cherchent à diminuer la masse salariale et tendent notamment de plus en plus à remplacer des titulaires par des personnels contractuels. Il s’agit pour nos directions d’inverser la problématique : puisqu’il est impossible de diminuer drastiquement la précarité, pourquoi ne pas l’organiser et la développer ? C’est ainsi que nous voyons apparaître dans nos établissements des discours pernicieux et décomplexés suggérant que nos établissements pourraient externaliser certaines fonctions (ménage, peinture, informatique, etc.), encourageant la sous-traitance et la précarité au nom du « cœur de métier » théorique.

Selon la stratégie des établissements, peuvent alors se multiplier les chargés de mission, sur CDD de 3 ans, personnels sur contrats de 10 mois pour économiser deux mois de salaire durant l’été, et finalement aboutir à l’externalisation de la fonction ou du service et ces personnels à temps partiel forcé pourront, le cas échéant, être embauchés par l’entreprise privée, prestataire de service. Cela peut prendre aussi la forme de migrations/absorptions de service des établissements vers la ComUE.

Depuis 2015, certaines ComUE ont reçu des dotations de postes qui ont permis des recrutements par concours, avec affectation des personnels dans des établissements composant la ComUE…

1.2.3.3 Opacité sur les flux financiers

On retrouve bien souvent derrière les ComUE une fondation de droit privé, sous la présidence d’une personnalité locale du MEDEF. C’est cette fondation qui gère les flux financiers des investisseurs industriels.

Dans le même temps, les ComUE se livrent une compétition acharnée pour décrocher un IdEx, LabEx, ISITE ou autre PIA.

1.2.3.4 Opacité sur l’immobilier

Le parc immobilier de nos établissements est aussi divers que varié : bâtiments dont la construction s’étale du XVIIe au XXIe siècle, classés ou non, dans un état que nos CHSCT connaissent bien. Jusqu’ici, seuls quelques établissements volontaires avaient obtenu la dévolution de leur patrimoine immobilier et devaient gérer et entretenir en direct leur parc immobilier. Le ministère entend étendre la dévolution du patrimoine immobilier à tous les établissements. Cette disposition va aggraver le processus d’« autonomie » et de régionalisation de l’ESR. Il est d’ailleurs en discussion que les bâtiments soient gérés par les régions, puisque les établissements qui ne pourront pas s’acquitter seuls de cette tâche quémanderont l’aide de leur région.

Patrimoine dépassant les besoins, parc trop coûteux à rénover… La tentation sera grande de spéculer sur des bâtiments situés en centre-ville où les prix de l’immobilier seront vus comme une possibilité de gain immédiat, tout en cédant à des opérations de rénovation à crédit, avec ou sans Partenariats Public Privé (PPP).


La CGT FERC Sup revendique

  • L’abrogation des lois LRU-Pécresse de 2007 et LRU-Fioraso de 2013.
  • L’arrêt immédiat de la mise en place des ComUE instaurées par la loi LRU-Fioraso et des fusions d’universités et d’établissements qu’elle impose.
  • La ré-étatisation de la masse salariale et de la gestion ministérielle des personnels.
  • Un plan de développement de l’enseignement supérieur public, avec des postes statutaires et des investissements.
  • L’abandon des PPP, sans indemnisations financières des opérateurs privés.
  • Le maintien du patrimoine immobilier de l’ESR au niveau de l’État.
  • Une planification des travaux nécessaires à la réhabilitation et à l’entretien du patrimoine immobilier de l’ESR.

En attendant la suppression des ComUE :

  • Les ComUE doivent rester des EPSCP et notamment ne pas devenir de grands établissements ayant la possibilité de déroger à la quasi totalité des dispositions régissant les EPSCP.
  • S’assurer que les conventions et annexes financières des regroupements d’établissements publics et privés (parmi lesquels peuvent figurer les établissements confessionnels), ne prévoient pas des financements du privé par le public.

Référence électronique

"1.2 ComUE, fusions et régionalisation", publié le 23 juillet 2017, URL : http://www.resistances.net/spip.php?article81, consulté en ligne le 15 mars 2024


Article précédent - Article suivant

FERC-Sup CGT