Revue syndicale à caractère scientifique et culturel de la CGT FERC Sup

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novembre 2014

4.1. Comment porter le combat dans les instances

Pour comprendre

Les résultats des élections dans les universités dont nous avons eu connaissance sont généralement très bons. Des adhésions arrivent. C’est étroitement lié à notre orientation et à la clarté de nos positions. Ainsi, après les élections d’octobre 2011, la FERC Sup CGT a 308 élus dans les comités techniques. Avec toutes les autres instances, cela fait beaucoup d’élus à coordonner.

Il est nécessaire d’approfondir notre réflexion collective sur le rôle et la fonction de nos élus et représentants CGT afin de mettre en cohérence leur travail au sein des différentes instances universitaires dans lesquelles ils siègent. Nous devons aussi bien comprendre et expliquer comment s’articulent les différentes instances locales et nationales où nous siégeons (CT, CPE, CAP et CNU) pour que syndicats, élus et représentants saisissent bien leur rôle et la manière dont leur travail syndical pèse, chacun à son niveau, sur les chaînes de décisions.

Dans l’ESR, le nombre d’instances se multiplie et l’ambition des syndicats FERC Sup CGT doit être la participation la plus large possible, occuper le terrain avec nos propositions et défendre partout les intérêts et les revendications des personnels. Mais cela n’est pas toujours possible et si les apports d’information, la connaissance du contexte d’établissement permettant de nourrir l’activité syndicale ne sont pas à discuter ; il semble légitime, compte tenu du taux de syndicalisation de l’Union et de la taille du syndicat, de bien définir la présence de la CGT dans les différentes instances locales et nationales, d’établir les priorités et d’utiliser cette participation pour renforcer l’action syndicale dans les établissements.

Parallèlement, il faut s’interroger sur la place des élus et mandatés au sein de chaque syndicat : la préparation des conseils, les sources et niveau d’information et de formation sur les textes réglementaires, les expériences et situation des autres syndicats et établissements… Siéger CGT, c’est siéger autrement, c’est défendre les personnels et le service public. C’est refuser le piège de la cogestion. C’est aussi débattre sur l’investissement des instances. Il faut éviter de noyer le syndicat et de négliger le travail de terrain. Le syndicat ne doit pas laisser les élus seuls, il doit utiliser les instances pour construire le syndicat et défendre les intérêts des collègues. C’est le syndicat, avec les adhérents, qui élabore la politique revendicative, détermine qui va les représenter et ce qui va être défendu dans les instances. Ainsi, nos organisations doivent aider les élus pour qu’ils puissent parler d’une voix concordante. La formation et la bonne santé démocratique du syndicat sont les piliers de ce travail avec les élus et mandatés.

4.1.1. Les conseils centraux des établissements

Les trois conseils d’université (bientôt deux comme le prévoit la loi LRU-Fioraso) doivent être une caisse de résonance pour nos revendications CGT et non de simples chambres d’enregistrement de la casse du service public d’Enseignement supérieur. Il s’agit d’y défendre un service public de qualité, d’affirmer que l’Enseignement supérieur et la Recherche relèvent de la compétence de l’État, de défendre la situation et les conditions de travail des personnels titulaires ou contractuels et ce en pleine connaissance des débats et actions sur l’ensemble du territoire.

Notre rôle doit se circonscrire à la défense des personnels, quels que soient l’organisation et le fonctionnement de nos établissements.

Il n’est pas question de voter un budget de pénurie, d’accepter la suppression de postes ou de négocier une hausse des primes en lieu et place de la hausse du point d’indice et d’une revalorisation des carrières que nous refuse le gouvernement. Il ne s’agit pas non plus de laisser négocier à la marge sur les multiples créations de formations à la solde du patronat qui favorisent la casse du cadre national des diplômes au prétexte d’une hypothétique manne financière pour l’Université. Notre activité syndicale au sein de ces conseils ne doit pas être de participer à l’optimisation de la gestion financière, la gestion prévisionnelle des ressources humaines ou l’amélioration du pilotage de la masse salariale.

Les instances se superposent, voire s’opposent ; la question de la gouvernance – un moment au centre des objectifs assignés par la loi LRU – cède de plus en plus la place à des comités d’orientation stratégiques ou comités de pilotage, directoires qui se comportent comme de véritables cabinets secrets pour préparer les décisions qui seront présentées aux conseils centraux, non pas pour être débattues mais seulement pour être entérinées.

Tout en étant conscients de notre capacité d’intervention et de participation à ces instances, ainsi que du niveau de représentation des élus du personnel, il faut rappeler que les élus doivent élaborer des comptes-rendus de leurs mandats pour fournir aux personnels et au syndicat les moyens d’analyser et de comprendre les enjeux de la situation. Le rôle des syndicats CGT est d’informer les personnels, d’alerter la communauté universitaire et de la mobiliser sur ses revendications.

4.1.2. Les instances paritaires de gestion des carrières des personnels

CPE et CAP

Les CAP sont des instances nationales ou académiques que l’administration (employeur) doit obligatoirement consulter avant de prendre certaines décisions relatives à la carrière des fonctionnaires. Elles sont consultées pour les refus de titularisation, l’avancement d’échelon et de grade, la promotion interne, les mises en détachement, disponibilité, congé parental et pour certaines sanctions disciplinaires. La CPE est le premier échelon local pour la défense et le suivi des carrières des collègues, mais dans le cadre de la loi LRU et des RCE, le danger réside dans la possible disparition d’une gestion nationale des personnels et, à terme, une casse du statut.

L’expérience récente fait apparaître plusieurs niveaux de problèmes, en particulier la maîtrise de la variation de la masse salariale dont le glissement vieillesse technicité (GVT) constitue le paramètre majeur. Le GVT représente la part de l’évolution des salaires qui résulte de la carrière propre à chaque agent.

Le paradoxe qu’introduit la loi consiste à faire gérer localement cette variation alors même que les statuts des agents titulaires de la Fonction publique d’État (Enseignants et BIATOSS) sont nationaux et font l’objet de consultations au travers des CAPA et CAPN. L’« autonomie » renforcée des établissements, les compétences élargies, la LOLF et en particulier la notion de fongibilité asymétrique, tendent chaque jour à remettre en cause, au nom des difficultés de gestion de la masse salariale, les statuts de ces agents titulaires et les garanties de carrière que ceux-ci constituent. Parallèlement, on voit localement un pilotage de la masse salariale offensif. Les impératifs liés à la Révision Générale des Politiques Publiques, doublée de la notion de plafond d’emplois – base de la contractualisation entre l’EPCSCP et l’État – déterminent les recrutements et la précarité.

Dans l’action de défense des personnels, les élus CGT ne doivent pas se laisser enfermer uniquement dans la défense individuelle et locale, mais replacer la participation syndicale dans le contexte général des statuts, des promotions, des carrières et des traitements. La problématique récurrente sur le classement ou non des agents y est résolu, seules les CAP sont garantes du statut et de l’égalité de traitement des agents. Le rôle du syndicat n’est ni la gestion de la pénurie, ni la réflexion avec les équipes de direction de nos établissements à partir de critères d’excellence et de réduction du déficit, de compétences ou de valeur professionnelle.
Tout agent a droit à un déroulement de carrière et aucune restriction budgétaire ne peut l’en priver.

CCP-ANT

Sur le modèle des CAP sont instituées, dans toutes les administrations et tous les établissements publics de l’État, une ou plusieurs commissions consultatives paritaires, compétentes à l’égard des agents non titulaires. La composition, l’organisation, le fonctionnement et les modalités de désignation des représentants des personnels concernés de ces commissions sont fixés par arrêtés ministériels. Les CCP ANT peuvent être consultées sur toute question d’ordre individuel relative à la situation professionnelle des agents non titulaires entrant dans leur champ de compétence. Elle aura donc à statuer par exemple sur le refus à des demandes de congés, de travail à temps partiel, de mise à disposition ou des avancements. Elles doivent être obligatoirement consultées avant toute décision de licenciement devant intervenir après la période d’essai, disciplinaire (sauf pour les avertissements et les blâmes) ou intéressant la situation professionnelle individuelle d’agents non titulaires.

Malgré la conviction que ces dispositifs vont dans le sens de l’institutionnalisation de la précarité, pour la FERC Sup CGT, ces commissions sont un outil de plus pour organiser la défense des personnels et faire avancer leurs revendications ainsi que les orientations de la CGT. Au sein de ces instances, nous devons rester vigilants et réactifs face aux possibles répercussions professionnelles et pour assurer l’existence d’un statut des élus qui permettra d’assurer la protection des élus contractuels.

CNU et CNESER

Ce mandat a permis l’émergence d’élus enseignants dans ces instances nationales. Si l’objectif reste de développer la présence CGT dans d’autres disciplines au CNU, pour notamment avancer dans la syndicalisation des EC, la question s’est posée et se pose encore sur le rôle des élus CGT. La profession de foi proposait « d’ouvrir la boîte noire du CNU » et de changer le mode de représentativité. Le CNU devait faire ses preuves devant la communauté universitaire. Il a fallu y défendre le statut de la fonction publique, le refus de l’excellence, dénoncer les réseaux de connivence et informer largement.

Au CNESER, la CGT a poussé à l’adoption de deux motions successives dénonçant, d’une part, l’opacité du dialogue de gestion entretenu par le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche avec les établissements dans la répartition des moyens, et, d’autre part, le désengagement de l’État des universités et des organismes de recherche qui aggrave les conditions de vie et d’études des étudiants. L’enjeu des diplômes nationaux ou du traitement équitable des usagers, quel que soit le territoire, sont d’autres problématiques majeures traitées dans ce domaine.

Lors du vote du projet de loi LRU-Fioraso, la FERC Sup CGT a clairement exprimé son opposition par un votre contre.

Au sein de cette instance, c’est l’échange entre les élus et les syndicats qui a rendu possible leur connaissance des situations locales et qui a permis à la voix de l’Union d’être audible au plan national tout en nourrissant l’activité locale. Pour gagner, il faut continuer à accompagner nos élus en leur faisant remonter les problématiques et propositions dont ils ont besoin afin de faire converger les revendications et les luttes.

4.1.3. Les instances sur l’organisation et les conditions de travail

CT locaux et ministériels

La loi du 5 juillet 2010 a modifié les dispositions relatives aux comités techniques paritaires qui deviennent des comités techniques. Dans la Fonction publique d’État (FPE), sauf exception, chaque ministère compte un comité technique ministériel, un comité technique d’administration centrale, des comités techniques de service déconcentré et, au niveau départemental, des comités techniques de direction départementale interministérielle.

Il y a au moins un CT dans chacun de nos établissements.

Les CT constituent des instances consultatives obligatoirement consultées sur les questions relatives à l’organisation et au fonctionnement des services ; aux évolutions technologiques et de méthodes de travail des administrations et leur incidence sur les personnels ; à la gestion prévisionnelle des effectifs, des emplois et des compétences ; aux grandes orientations en matière de politique indemnitaire et de critères de répartition y afférents ; à la formation et au développement des compétences et qualifications professionnelles ; à l’hygiène, la sécurité et les conditions de travail des agents, lorsqu’il n’existe pas de CHSCT. Les CT sont également consultés sur la participation de l’État et de ses établissements publics au financement de la protection sociale complémentaire de leurs agents. Ils reçoivent communication et débattent du bilan social annuel.

CHSCT locaux et ministériels

Depuis la loi du 5 juillet 2010, les comités d’hygiène et de sécurité voient leur champ de compétence élargi en devenant des comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail. Cette transformation est une avancée majeure pour la prise en compte des conditions de travail dans la Fonction publique. Il est institué un ou plusieurs CHSCT dans toutes les administrations de l’État qui a pour mission de contribuer à la protection de la santé physique et mentale et de la sécurité des agents dans leur travail, à l’amélioration des conditions de travail des agents et de veiller au respect des dispositions légales en ces domaines.

Dans un contexte de fortes restructurations dégradant les conditions de travail, cette instance a un rôle central. Consciente de ces enjeux, l’Union FERC Sup CGT a mis en place un plan de formation des syndiqués et des mandatés CHSCT, un réseau de travail national et des fiches techniques pour accompagner ces mandats. Le lien instances locales/nationales y trouve son écho.

Les CT et CHSCT traitent directement des conditions de travail des salariés. Les syndicats CGT doivent s’emparer des points à l’ordre du jour des réunions de ces deux instances pour informer les personnels et les mobiliser. Les syndicats FERC Sup CGT doivent tout particulièrement investir les CHSCT pour qu’ils puissent fonctionner pleinement : les restrictions budgétaires ne peuvent exonérer les directions d’établissements de leur obligation d’assurer la sécurité des salariés et de protéger leur sante. Les syndicats CGT doivent notamment exiger que des expertises préalables soient menées sur les conséquences des fusions et restructurations d’établissements.

4.1.4. Les suprastructures et les groupes de travail

Les nouvelles structures universitaires bouleversent dorénavant tout l’environnement professionnel, aussi bien pour les enseignants que pour toutes les catégories d’agents BIATOSS et, bien sûr, pour les étudiants.

On assiste à une accélération de la mise en place de structures de partenariat au moyen des PRES (dorénavant les CUE), des fusions, de la création de Fondations de Coopération Scientifique ou des Communautés d’Universités entraînant de ce fait une complexité supplémentaire. Grand emprunt pour les investissements d’avenir, appels à projets, pôles d’excellence dans lesquels peuvent se retrouver EPCSCP, EPST, entreprises privées, IDEX, LABEX, IDEFI… tout concourt à opacifier le cadre professionnel d’exercice et génère une perte générale de repères.

Consécutivement, apparaissent de nouveaux lieux de « gouvernance » avec peu ou prou de représentants des usagers et des personnels. Le modèle proclamé de cette « gouvernance » s’appuie sur des organes stratégiques de pilotage (sénats, directoires, groupe de travail) qui s’affranchissent des conseils élus par la communauté universitaire.

Cette surenchère d’instances implique un niveau de représentation important et accentue le risque précédemment évoqué de transformer notre syndicalisme de revendication en un syndicalisme « parlementaire » associé à la « gouvernance » des établissements.

Ne perdons pas de vue l’objectif des présidents d’écarter les organisations syndicales de toute prise de décision et de contrôle. La multiplication des groupes de travail, outre le fait de canaliser l’énergie de militants déjà privés de temps, permet de justifier un pseudo « dialogue social » en dehors de négociations directes avec les organisations représentatives des personnels.

La FERC Sup CGT met en débat

Aujourd’hui, on constate une multiplication des instances (établissements, communautés d’universités et d’établissements) et des groupes de travail tous azimuts pour lesquels la participation des organisations syndicales est sollicitée.

Toujours soucieux de garder l’équilibre entre la présence sur le terrain au plus près des personnels et de leurs préoccupations, et la participation aux instances des établissements pour porter la voix des salariés et leurs revendications, les syndicats doivent s’interroger en permanence sur la pertinence de leur participation aux différentes instances de discussions et de « négociations » qui leur sont proposées.

Les directions multiplient les instances et groupes de travail pour asphyxier les syndicats d’un côté et couper ainsi les élus ou mandatés du syndicat et des personnels, faute de temps pour rendre compte de leurs mandats.

Siéger dans une instance sans porter un mandat précis du syndicat et sans rendre compte aux salariés ne pourrait que conduire à un syndicalisme hors sol, qui dénaturerait fondamentalement le mode d’action syndicale, collective, fondée sur la création d’un rapport de force favorable aux salariés, que nous portons et défendons.

La FERC Sup CGT s’engage donc à développer partout, dans l’Union et les syndicats, une réflexion approfondie sur la manière de fonder l’action syndicale, et son articulation avec la fonction de représentation du syndicat à travers les élections et les mandats, en lien avec la qualité de vie syndicale et la présence effective des militants sur le terrain auprès des personnels pour construire le rapport de force à partir de leurs revendications.


Référence électronique

"4.1. Comment porter le combat dans les instances", publié le 3 novembre 2014, URL : http://www.resistances.net/spip.php?article59, consulté en ligne le 15 mars 2024


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