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avril 2011

IV • La notation s’appuie sur le mépris d’une des plus nobles tâches de l’Université : l’enseignement

Qu’en est-il de l’enseignement ? Certaines activités fondamentales pour la société tel l’enseignement et la vulgarisation de la science ne donnent pas nécessairement lieu à des produits quantifiables et se prêtent mal à une évaluation rapide. On comprend que ces activités soient mal considérées par les agences de notation.

La nouvelle mission de notation individuelle confiée au CNU reflète ce préjugé. D’une part, on entend instituer une notation de l’enseignement sans se déplacer pour l’entendre - c’est dire le sérieux avec lequel on considère cette activité. D’autre part, les collègues dont la note sera dégradée pourront se voir proposer d’assurer plus d’heures d’enseignement, conformément à l’idéologie de la réforme du statut des enseignants-chercheurs, selon laquelle plus on est un “mauvais” chercheur, plus on doit être devant les étudiants. Comme la communauté universitaire l’a manifesté vigoureusement en 2009, il s’agit d’une remise en cause profonde d’un idéal du Service public de l’Université, celui d’une institution où tout citoyen peut venir suivre l’enseignement de ceux qui sont le plus avancés dans le défrichement et l’entretien durable d’un champ du savoir.

Le gouvernement a d’autres projets : celui de pôles d’ “excellence” concentrant les moyens, en interface avec les grandes écoles, peuplés de chercheurs “excellents”, confortablement déchargés d’une large partie de leur devoir d’accompagnement des étudiants dans la découverte du savoir. On le constate déjà avec l’usage immodéré fait par le ministère de l’Institut Universitaire de France (IUF), dont les postes ont été multipliés et en partie attribués hors du contrôle de sa commission scientifique, afin de distinguer ceux de nos collègues dont la qualité exigerait que l’on prive durablement (cinq ans, renouvelable pour les membres seniors) et significativement (service réduit au tiers) les étudiants de leur présence - sans oublier d’attribuer automatiquement aux pensionnaires de l’IUF la généreuse PES. Une fois de plus il ne s’agit pas de stigmatiser nos collègues, qui poursuivent de bonne foi leurs activités scientifiques au service de leur institution, en cherchant à bénéficier des meilleurs conditions pour le faire, mais d’appeler à la prise de conscience sur les effets globaux d’un système.

A côté de ces centres d’excellence, il y aura des pôles universitaires de proximité, peuplés d’enseignants n’ayant plus le temps de chercher et d’étudiants destinés à une insertion professionnelle rapide, comme le prévoit le dernier projet de la ministre pour cette législature, celui d’une licence remodelée en vue de la professionnalisation, avec un semestre dédié à cet objectif.
L’accord cadre CPU-Medef, signé l’été dernier, annonçait ce changement : les entreprises, qui autrefois se chargeaient de former aux tâches spécifiques de leur secteur des jeunes pouvant recevoir des formations théoriques ou pratiques plus générales, veulent désormais que l’Université se charge aussi de cela à leur place. Veut-on nous dire que le Service Public aurait le droit de survivre, à condition de se faire l’auxiliaire du marché, en lui épargnant les coûts de préparation de la main d’oeuvre ? Il devrait en revanche laisser la place là où son activité pourrait être lucrative, “mieux” accomplie par des formations à l’accès onéreux parrainés par des instituts et des fondations libérés des servitudes de la Fonction Publique.


Référence électronique

"IV • La notation s’appuie sur le mépris d’une des plus nobles tâches de l’Université : l’enseignement", publié le 11 avril 2011, URL : http://www.resistances.net/spip.php?article25, consulté en ligne le 15 mars 2024


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